« Rassemblés dans le Christ, conduits par l’Esprit, nous construisons le Royaume... » C’est au rythme de ce chant, lancé par la chorale du doyenné et aussitôt repris par l’assemblée, que s’est ouverte ce matin la messe chrismale à la paroisse de Saint-Louis. Dans l’église de basalte, l’Église de chair chante d’un seul cœur tandis qu’une vingtaine de servants d’autel s’avancent sous l’œil attentif du père Yannick Valencourt, coordonnateur diocésain de ce service. Derrière eux viennent les diacres ; l’un d’eux, Jean-Marc Rivière, porte le Lectionnaire. Les prêtres les suivent, saluant au passage celles ou ceux qu’ils reconnaissent. Enfin vient Mgr Gilbert Aubry, qui bénit les fidèles.
[rouge]Plus de 3000 personnes[/rouge]
Pour cette messe chrismale qui manifeste l’unité du « peuple sacerdotal » autour de son évêque, les fidèles sont venus si nombreux que l’église, pourtant la plus grande de l’île, ne suffit pas à les contenir. La foule se presse au fond, debout, s’entasse dehors sous des chapiteaux de toile : nombreux sont ceux qui la suivront sur un grand écran placé à l’extérieur. Tout à l’heure bruissante de menues paroles, cette assemblée de plus de 3000 personnes écoute maintenant Suzanne Bénard, porte-parole de la paroisse, qui souhaite la bienvenue à tous et exprime la joie de la communauté paroissiale « que cette célébration solennelle se déroule dans notre paroisse ».
« Après les événements à la fois douloureux et déstabilisants qui ont récemment secoué notre île, la célébration de cette eucharistie nous rend plus forts et plus déterminés à trouver, dans le Christ et avec l’Esprit Saint, le désir et la manière de rendre notre monde plus humain et plus fraternel, poursuit-elle. Puissent nos paroisses être, elles aussi, capables d’avancer sur les pas du Christ, dans un esprit d’unité et d’ouverture sur le monde pour vivre le concile Vatican II qui nous invite à “faire Église et à vivre ensemble” ».
Tel est en effet le thème qui a nourri la réflexion des fidèles pendant tout le Carême. Et l’évêque s’empresse d’y faire écho dans sa réponse : « L’Église est « peuple sacerdotal », cela commence avec chacun, avec chacune de nous. Est-ce que je suis Église avec les autres dans la Tradition des Apôtres ? Est-ce que tu es Église avec les autres ? Église à La Réunion, est-ce que tu es le peuple des enfants de Dieu Notre Père avec les autres, avec le peuple qui est à La Réunion ? »
[rouge]« Éveilleurs de la résurrection »[/rouge]
Son propos ouvre naturellement au rite pénitentiel, suivi du Gloria. Les lecteurs se succèdent à l’ambon pour proclamer les lectures d’Isaïe (61, 1-9) et de l’Apocalypse (1, 5-8), puis le diacre Jean-Marc Rivière chante l’Évangile, qui reprend la première lecture : « L’Esprit du Seigneur est sur moi m’a consacré par l’onction... Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres, aux aveugles qu’ils verront la lumière, annoncer aux opprimés la libération, annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur... “Cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit” » (Luc 4, 16-21).
« Jésus réalise la prophétie d’Isaïe parce qu’il est le feu qui brûle dans le temple pour un sacrifice continuel à Dieu », précise alors Mgr Gilbert Aubry dans son homélie, évoquant cette parole de Jésus : « Je suis venu apporter le feu sur la terre et comme je voudrais qu’il fût déjà allumé ! » (Luc 12, 49). « Quel feu ? » Le feu « d’un amour sans limites », explique-t-il. Et nous autres baptisés, « nous aussi nous sommes le “temple de Dieu”. Nous aussi nous avons la même mission que le Christ. Dieu nous aime tellement aujourd’hui qu’il a besoin de nous aujourd’hui pour répandre son amour là où nous vivons. Nous sommes appelés par Dieu pour être des “éveilleurs de la résurrection” dans tous les secteurs de la vie ».
[rouge]Renouvellement des promesses[/rouge]
Après l’homélie et le chant du Veni Creator, l’évêque invite les prêtres, puis les diacres, à renouveler leurs promesses sacerdotales ; il convie ensuite les fidèles à prier pour eux.
[rouge]Bénédiction des huiles[/rouge]
Des diacres s’avancent alors, portant les huiles. L’évêque bénit l’huile des malades, puis l’huile des catéchumènes ; il consacre le saint chrême tandis que l’odeur du géranium dont celui-ci est parfumé se répand dans l’église. Le saint chrême servira pour l’onction des sacrements de baptême, de confirmation et d’ordre (ordination), ainsi que pour la consécration des églises et des autels. « Fais resplendir ta sainteté sur les personnes et les objets marqués de cette huile sainte », supplie la longue prière de consécration prononcée par l’évêque.
La célébration suit ensuite son cours ordinaire. La prière eucharistique fait particulièrement mention des prêtres décédés cette année : les pères René Payet, Louis Rigolet, Michel Blin, le diacre Paul Picard. L’assemblée prie avec ferveur le Notre Père. Après l’échange de la paix, prêtres et diacres parcourent les rangs pour donner la communion. Et la messe chrismale se termine afin la solennelle bénédiction aaronique, donnée par l’évêque : « Que le Seigneur vous bénisse et vous garde... Que le Seigneur fasse resplendir sur vous son visage et vous accorde sa grâce... Que le Seigneur tourne vers vous son visage et vous apporte la paix... et que Dieu tout-puissant vous bénisse et vous garde... ».
[rouge]Vers le triduum pascal[/rouge]
Après l’envoi lancé par un diacre : « Allez dans la paix du Christ" , c’est finalement sur un chant à Marie que prêtres, diacres et évêque quittent l’église, suivis des fidèles. À la sortie, ces derniers battent les mains de plaisir, tout heureux de retrouver leur évêque après son absence du diocèse ces dernières semaines.
Tandis que bon nombre de laïcs prennent le temps de pique-niquer devant l’église avant de rentrer chez eux, les prêtres, les diacres et leurs épouses se retrouvent pour un repas fraternel. Peu à peu, tous reprennent les chemins des paroisses, prêts à entrer dans le triduum pascal, pour vivre avec le Christ les jours de la Passion, ressusciter avec Lui et devenir à sa suite « éveilleurs de résurrection ».