Faisons bonne l’année !
Article mis en ligne le 30 décembre 2011

par Mgr Gilbert Aubry

Le temps passe et que devenons-nous ? « Bonne Année »… je n’ose pas trop le dire de cette manière tellement les mots sont usés et risquent de sonner faux comme une formule magique aux effets automatiques. Je préfère me dire à moi-même et à vous tous « Faisons bonne l’année ! » Avec la grâce de Dieu et la collaboration des uns et des autres, rendons l’année qui vient meilleure que celle qui se termine. Du moins, essayons de la rendre bonne en ce qui dépend de nous, de nos marges de liberté et de responsabilité là où nous sommes, là où nous vivons.

Faire la fête, en des temps incertains, c’est essayer d’oublier les difficultés du quotidien pour créer un peu de chaleur humaine, une éclaircie avec un peu de lumière, un peu de joie. A Noël et au Nouvel An. C’est une bonne chose si cela se passe dans la modération, dans la sobriété, dans le respect de l’environnement et ne perturbe pas les bébés, les enfants, les malades, les personnes âgées, les animaux, la nature. L’excès est nuisible en tout et dans une société traversée par les nuisances sonores, nous ne favoriserons jamais assez le calme, le silence pour un climat d’humanité apaisé.

Faire la fête nous renvoie finalement au sens de la vie quotidienne. Notre île n’est ni un petit paradis, ni l’enfer, ni le purgatoire. C‘est un espace restreint, avec une population qui se densifie, dans une histoire qui ne cesse d’évoluer, dans une mondialisation où tout est en interaction permanente. La Réunion est l’espace prioritaire de notre vie, de notre humanisation. Le croyant dira de notre sanctification. C’est le lieu où nous sommes appelés à vivre ré-unis, enracinés localement, ouverts sur l’Océan Indien et le monde. Mais si, ici, nous ne sortons pas des jeux de pouvoirs pour le pouvoir nous risquons de perdre notre âme et notre vivre ensemble. Ce vivre ensemble n’est pas idyllique mais enviable à bien des égards et par beaucoup de pays. Une île c’est tellement petit qu’on peut se jouer les uns des autres et s’utiliser réciproquement même si on est dans des camps adverses. Qui gagne ? Tout le monde risque d’être perdant. Il est nécessaire que dans le respect des légitimes diversités et les réajustements nécessaires, tout le monde soit gagnant en fonction de l’intérêt général, du respect des personnes humaines, des familles, de la paix sociale.

La paix sociale ne va pas de soi. Il ne nous suffit pas de la souhaiter. Nous avons à la construire. Je pense au conflit de l’ARAST. Il n’aurait jamais dû s’éterniser. Il ne peut pas s’éterniser. Les grévistes ont sollicité le défenseur des droits sur le dossier. Formulons les meilleurs vœux pour son action. Mais le plus normal et le plus important, c’est que les responsables concernés se réunissent pour une sortie de crise rapide par le haut. La vie n’attend pas. Tout le monde a besoin de vivre. Je pense aussi aux tensions, aux conflits que vivent des entreprises, des associations de toutes natures. Je pense finalement à l’ensemble de la société réunionnaise. Engageons-nous à lutter contre un climat de violence, de culture de la violence, de grossièreté, de haine meurtrière parfois jusque dans des couples. Nos enfants et nos jeunes méritent mieux. Ils ont besoin d’être écoutés, d’être aimés. Ils ont besoin de repères. Ne les laissons pas livrés à eux-mêmes. Faisons qu’ils ne détestent pas la vie jusqu’à l’extrême parfois… Aidons-les à aimer la vie, à réussir leur vie. Il y a même des champions sportifs parmi eux et si certains se donnent des airs de caïds et de provocateurs, c’est souvent qu’ils veulent s’affirmer comme solides. Ils se mettent une protection pour camoufler leur intériorité profonde qu’ils ne peuvent exprimer. Je souhaite que l’éducation des enfants et des jeunes soit l’objet d’une attention particulière pour qu’ils soient champions en humanité. D’ailleurs, de plus en plus de parents se rendent compte de cette nécessité : être proches de leurs enfants et les éduquer à la liberté. C’est un signe d’espérance. Les parents méritent notre soutien et nos encouragements pour résister à une ambiance souvent nihiliste qui conduit à la destruction des valeurs. Parents, ne vous découragez pas. Ce que vous semez en amour vous reviendra un jour en amour.

Pour « faire bonne l’année », il nous faut aussi nous interroger sur le modèle de société que nous voulons construire. Vouloir. Construire. Où nous mène une civilisation des loisirs et de frivolités quand les économies doivent se restructurer au service de la dignité humaine, avec les moyens de vivre pour tous ? Il nous faut repenser nos modes de vie en fonction de l’essentiel, en fonction de la vie à faire réussir dans la solidarité et la responsabilité, avec la confiance à développer. C’est aussi une question politique qui devra être prise en considération dans les élections à venir. C’est d’abord l’affaire de chacun de nous et des relations de proximité dans les familles, les associations et les quartiers. Il y a des talents à faire fructifier, des synergies à établir. Le moment venu, notre vote sera important.

L’année sera difficile. Raison de plus pour écouter ce désir de reconnaissance de dignité humaine qui palpite en chacun de nous comme il palpite dans le cœur de l’autre, de tous les autres. Et dans ce désir, il y a la paix qui peut se construire sur l’amour, la vérité, la justice et la liberté. Dans l’Esprit qui nous fait vivre, je redis ma prière du soir de Noël :

« Mon Dieu, fais lever ta lumière, en nos cœurs, dans nos relations, sur notre île, sur le monde.

Donne-nous le regard du cœur : chacun de nous et tous, nous sommes appelés à être tes enfants bien-aimés par Jésus, dans le souffle de l’Esprit.
Rends-nous attentifs aux joies et aux peines les uns des autres pour cheminer ensemble là où nous vivons en famille, et dans la société.
Aide-nous à donner sa place au frère et à la sœur dans nos communautés, dans toutes nos relations. »

À vous tous, chercheurs d’humanité, je souhaite la santé, une main secourable dans les difficultés, les moyens de vivre, les moyens de vivre en paix en vous-mêmes et avec les autres. Faisons l’année bonne ! Bonne Année !


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