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Père Jean Welment : « Déjà épris de ciel » (cf. Mt 5, Rm 8)
Article mis en ligne le 31 janvier 2019

par Centre diocésain d’information

Mgr Gilbert Aubry a célébré ce mardi 29 janvier 2019 les obsèques du père Jean Welment en l’église du Bon Pasteur à Ravine-Blanche (Saint-Pierre). Voici l’homélie qu’il a prononcée à cette occasion.

Chers frères pêtres,
Chers frères diacres,
Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,
Chers frères et sœurs en humanité,

Chaque dimanche, à la messe, nous proclamons la foi de l’Église « Je crois en l’Esprit-Saint, à la sainte Église catholique, à la communion des saints, à la résurrection de la chair, à la vie éternelle ». C’est le moment de croire, c’est le moment d’espérer, c’est le temps d’aimer.

La mort est un moment grave, douloureux parfois, douloureux pour ceux qui partent, douloureux pour ceux qui restent. Mais, dans la foi à la résurrection de la chair et à la vie éternelle, la mort n’est pas triste. À travers le grand passage et la purification qui l’accompagne, la mort fait partie d’un processus qui conduit chacun de nous et nous tous… de la conception jusqu’à la béatitude de la Vie éternelle, béatitude d’une vie éternellement réussie. « Heureux… Bienheureux » avec le Christ, ceux qui sont morts en Lui pour vivre par Lui et avec Lui.

Dans son exhortation apostolique Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse – Gaudete et Exsultate—, le pape François nous dit que les Béatitudes sont comme la carte d’identité du chrétien. Donc, si quelqu’un d’entre nous se pose cette question « comment fait-on pour être un bon chrétien ? », la réponse est simple : il faut mettre en œuvre, chacun à sa manière, ce que Jésus déclare dans le sermon des Béatitudes. À travers (les Béatitudes) se dessine le visage du Maître que nous sommes appelés à révéler dans le quotidien de nos vies. Le mot « heureux » ou « bienheureux » devient synonyme de « saint », parce qu’il exprime le fait que la personne qui est fidèle à Dieu et qui vit sa parole atteint, dans le don de soi, le vrai bonheur (§ 63 et 64).

Le père Jean Welment dont nous célébrons les obsèques aujourd’hui a été fidèle à Dieu jusqu’au bout de l’amour, jusqu’au bout de sa vie, dans le don de lui-même au Christ, pour devenir « prêtre la manière des apôtres ». Il a révélé « le visage du Maître ». Depuis son baptême, il a grandi avec le Christ qui l’a fait grandir en lui. Cela s’enracine dans une histoire de famille chrétienne dont les parents réunionnais sont allés s’établir à Madagascar. Jean est né là-bas, il a grandi à Joffreville sur les hauteurs proches de Diego Suarez où il est né en 1942. Pour sa vocation, il doit beaucoup à sa mère. Celle-ci, après l’ordination presbytérale de son fils le 2 juin 1974 en l’église du Chaudron, a écrit à Monseigneur Georges Guibert alors évêque de La Réunion : « En ce grand jour pour mon fils, combien j’aurais été heureuse d’être près de lui. Je ne l’ai été que par la pensée et la prière. (…) J’ai toujours désiré avoir un enfant prêtre, mon vœu le plus cher est exaucé. Croyez-moi, je suis la plus heureuse des mamans qui ne cesse de prier et d’offrir mes sacrifices pour que ce nouveau prêtre reste fidèle à sa vocation et soit ce bon prêtre dont l’Église a besoin. »

Nous constatons aujourd’hui que sa prière a été exaucée.

Quel a été le parcours de Jean ? Il fera ses études secondaires au Petit séminaire de Cilaos. Je me souviens très bien de son dynamisme. Très sportif, il était un entraîneur capable de renforcer une équipe de football pour des matches contre ceux de « la ville » ou des « Mares ». Puis, partir de la 1re, il a fait deux ans au collège Saint-Michel à Tananarive, avec les Jésuites, 1962-1963, 1963-1964. En même temps, il a été responsable d’une troupe scoute. Il échappera au service militaire. À 22 ans, en septembre 1964, Monseigneur Guibert envisage de l’envoyer à Rome, au Séminaire français et à l’université Grégorienne. De Joffreville où il se trouve en vacances, Jean écrit : « J’ai appris avec joie que vous m’envoyez à Rome. Votre confiance n’a fait que me donner une plus grande conscience de mon idéal. Je m’appliquerai à ne jamais vous décevoir, si dure que soit cette route » (19 juillet 1964). Jean Welment va passer sept ans de suite à Rome où il obtiendra une licence en philosophie et une licence en théologie. Je précise qu’à cette époque, tous les cours se donnaient en latin et que tous les examens se passaient en latin, aussi bien les écrits que les oraux. Pendant sa période romaine, Jean était très proche de la communauté de Saint-Louis des Français et il était responsable d’une troupe scoute.

Jean Welment regagne La Réunion en juillet 1971. Il souhaite faire un stage pastoral avant d’envisager l’ordination presbytérale. Il sera aumônier-adjoint du lycée du Tampon puis du lycée de Saint-Denis. Après sa période de stage, il écrira sa demande d’ordination presbytérale en février 1974. Il écrit notamment : « En ces temps de bouleversements, je suis aussi conscient de mes faiblesses et de mes limites. Je sais que je ne serai jamais un prêtre parfait, ayant en poche le projet de Dieu. Cet engagement dans le sacerdoce au service de l’Église et du monde m’apparaît comme un risque. Mais le Christ me fait comprendre, dans la parabole des talents, qu’on n’est jamais perdant lorsqu’on risque quelque chose pour Dieu » (7 février 1974). Et dans la feuille paroissiale du Port, juste avant son ordination presbytérale, il écrit « le prêtre, pour moi, est donc avant tout un rassembleur », un rassembleur qui marche la suite du Christ et qui s’attend donc « à être comme lui objet de contradiction ».

Jean est ordonné prêtre le 2 juin 1974, jour de la Pentecôte, au Chaudron. Dès lors, les ministères vont se succéder :
- Aumônier du lycée de Saint-Denis, 1974-1975.
- Équipe sacerdotale du Port, 1975.
- Curé de Cilaos de 1989 à 1999… dix années où il sera aidé pastoralement par le frère Daniel Gavard, frère auxiliaire devenu prêtre depuis.
- Curé de Vincendo de 1999 à 2004.
- Équipe sacerdotale de Saint-Pierre à partir de 2004, avec attachement particulier à la Ligne des Bambous.

… et puis est venue cette période de longue maladie où ses forces ont diminué jusqu’à épuisement. CHU de Bellepierre puis transfert à Saint-Pierre où il est décédé le 27 janvier dans le service des soins palliatifs. J’ai eu la grâce d’avoir avec lui un échange spirituel et amical. Il était tout offert, abandonné dans les mains de Marie, Magnificat dans le cœur de Jésus.

En reprenant le dossier de Jean, jeme suis arrêté sur un poème qu’il avait écrit en 1997 Cilaos :

Cilaos*
Lorsque vous contemplerez
Le ciel
Une nuit d’hiver
à
Cilaos
Ou une nuit de pleine lune,
Avec pour seul horizon la plage
Des cimes
Donnant sur les étoiles

Lorsque vous verrez
Se lever la lune sur une cascade de nuages
Et se coucher dans les berceaux
Des montagnes,
Vous ne saurez plus
si
Vous êtes
D’ici
ou
D’ailleurs

Comme d’ailleurs
Plus d’un parmi
Ceux
D’ici
Déjà épris
Du ciel
Pour une nuit d’hiver
ou
Pour une nuit de pleine lune

Avec pour tout horizon
Comme des fleurs
En brassées
Les étoiles
Enlacées

*Ne pas prononcer

« Lorsque vous contemplerez le ciel… lorsque vous verrez… déjà épris de ciel ». Dans ces paroles, je sens battre
le cœur du prêtre
le cœur du poète
le cœur du contemplatif bourré d’humour et toujours cœur aimant.

Comment voulez-vous que Jésus-Christ, Notre Seigneur, le seul grand Prêtre, n’accueille pas cet homme qui lui a donné sa vie pour devenir son prêtre ? Au milieu des « turbulences » qui ont constitué les circonstances de son choix, au nom de Jésus-Christ, Jean a baptisé, a pardonné, a célébré l’eucharistie, a béni des mariages, a accompagné des malades et des mourants.

Jean, que cette eucharistie soit pour toi face à face avec Dieu. J’en ai la certitude, rien ne peut te séparer de l’amour de Dieu. « Rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Jésus-Christ Notre Seigneur » (Rm 8, 38-39). Amen !

(Photo : Joachim Thiébatu, Wikimedia Commons)


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